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Vieillir ou grandir, quand les mots nous manquent.

Alors que la pyramide des âges témoigne d’une augmentation de la part des ainés dans la société française, il est intéressant de s’arrêter sur la définition apportée aux mots. Pour une femme active, un quinquagénaire, un nonagénaire ou encore un adolescent, le mot vieillir prend un sens bien différent et mérite une définition distincte. Pourtant la langue française réputée si riche par son vocabulaire peine encore aujourd’hui à lui accorder des nuances et des couleurs.

Il existe d’autres espaces où la langue est absente. Perdre son enfant pour un parent reste sans nom (au sens propre et figuré). On ne le qualifie ni d’orphelin, ni de veuf. La personne faisant le deuil de son enfant n’est donc pas reconnue par la langue française renforçant un effet d’invisibilité. Seuls les réseaux sociaux ont fait émerger un mot aussi valise que mystique : Parange.

La personne qui vieillit connait une trajectoire semblable par cette absence de synonyme et de définition. Dès lors que la sémantique est absente pour qualifier le sens et les différentes étape du vieillissement, dire à quelqu’un qu’il vieillit c’est rapidement mettre en exergue un changement dégradant, une compétence mal maitrisée ou pire encore : une dégénérescence humiliante.

Arrêtons nous un instant sur ce verbe vieillir et cherchons lui un synonyme. Il n’en a pas sinon le verbe se décatir qui ne s’utilise que peu ou pas dans un langage courant. Il faut alors faire preuve d’imagination si on veut qualifier avec précision une personne vieillissante. Notons que lorsque la langue française peine à définir ses mots, très vite les préjugées ou les ignorances s’engouffrent dans l’ornière des idées raccourcies à base de mots familiers ou argotiques comme sucrer les fraises ou se plisser. Et si ce mot est si peu apprécié, c’est que nous sommes incapables de lui adjoindre une notion de bonheur, de joie de vivre et qu’il résonne avec l’impotence et la mort.

Allons plus loin et analysons le mot sénior. Il classe, selon les organisations qui l’utilisent, tous les individus de plus de 45 ans. Pourtant on peine à croire qu’une personne de 45 ans est les mêmes attentes ou même profil qu’un centenaire. Encore une fois cette absence de finesse entre les mots suscite l’amalgame et ne permet pas une subtile distinction par une segmentation des seniors actifs, des seniors autonomes et des séniors grabataires. La pensée devient alors limitante et empêche la personne qui fait usage du mot de se préserver de tout ambiguïté.

Ce phénomène inconscient visant à précipiter un individu vieillissant sans distinction dans une catégorie de vieilles personnes, peut selon moi avoir un effet impactant sur l’employabilité, la relation à l’autre mais aussi sur la santé mentale en général des personnes à moyen et long terme. L’âgisme trouve sa porte d’entrée.

Vieillir, Sénior, Personne âgées, il est important de requalifier ces expériences d’une vie. Si les mots n’aident pas à bien vieillir, il peuvent cependant aider à mieux vieillir !

La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité

Constitution de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)

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